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Messagede bipbip » 31 Mar 2015, 14:16

Espagne: vague de perquises et d’expulsions pendant l’opération Piñata. Au moins 28 arrestations !

Le matin du lundi 30 mars 2015, l’État espagnol a lancé l’opération Piñata (faisant suite à l’opération Pandora de décembre dernier): les flics ont perquisitionné et parfois expulsé au moins 17 centres sociaux squattés et arrêté au moins 28 personnes à Barcelone, Madrid, Palencia et Grenade.

... https://fr.squat.net/2015/03/31/espagne ... on-pinata/
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Re: Espagne

Messagede bipbip » 02 Avr 2015, 15:09

Espagne : Operación Piñata, nouveau coup répressif

Aujourd’hui une nouvelle assombrit le soleil matinal. La police nationale, une fois de plus, a perquisitionné divers lieux de vie et centres sociaux occupés dans les villes de Barcelone, Madrid, Grenade et Palencia, au total 17 perquisitions (dont six auraient été effectuées dans des centres sociaux et espaces libertaires), qui se sont finies par 14 arrestations, les personnes arrêtées étant accusées d’être membres d’une « organisation terroriste » et du placement de divers engins explosifs ou incendiaires, en plus de l’accusation d’avoir participé à la planification (et non l’exécution) des attaques contre la Basilique del Pilar à Zaragosa et contre la Cathédrale de la Almudena à Madrid, toutes les deux revendiquées par le dit « Commando insurrectionnel Mateo Morral », et dont sont accusé-e-s aussi les compagnon-ne-s Mónica Caballero et Francisco Solar, qui sont toujours en prison.

D’après les informations de sources proches et connues à Madrid, au moins trois centres sociaux occupés ont été perquisitionnés (La Quimera à Lavapiés, La Enredadera à Tetuán et La 13/14 à Vallecas). À La Quimera, les flics auraient fait irruption ont défonçant la porte avec un de leurs fourgons. Là, ils ont chopé 15 personnes, l’une d’elles avec un mandat d’arrêt pour cette affaire et les 14 autres pour le supposé délit de résistance (ce qui élève le nombre d’arrestations aujourd’hui à 26. Les personnes arrêtées devraient passer devant l’Audiencia Nazi-onal [1] mercredi.

Selon la presse bourgeoise (c’est-à-dire selon la police), les 14 personnes arrêtées (9 à Madrid, 3 à Barcelone et 2 à Palencia) pour appartenance à cette prétendue organisation criminelle seraient supposées membres des GAC, Groupes Anarchistes Coordonnés, un collectif éditorial ouvert et public qui, après avoir édité le livre « Contre la Démocratie » (dont une description et un lien de téléchargement sont disponibles ici [en espagnol]), a été transformée par l’Audiencia Nacional en organisation terroriste, sans preuves et sans aucune base. Non content de cela, le média bourgeois étatique TVE [télévision espagnole, NdT] définit les GAC comme (attention à ce qui va suivre) « filière espagnole des italiens de la FAI/FRI ». C’est curieux, parce que quiconque examine un petit peu les communiqués et le fonctionnement de la Fédération Anarchiste Informelle arrivera sans difficulté à la conclusion qu’il s’agit d’un nom qui peut être revendiqué par des cellules et groupes informels qui se reconnaissent dans des bases communes, de la même manière qu’avec le Front de Libération Animale. La FAI/FRI (Fédération Anarchiste Informelle / Front Révolutionnaire International) non seulement n’est pas une organisation fixe et structurée comme aiment le faire croire les journalistes [2], mais n’est pas non plus italienne. Que la proposition de la Fédération Anarchiste Informelle soit sortie en 2003 en Italie et que quelques années plus tard en Grèce soit annoncé le projet FAI/FRI, dans le but de revivifier cette idée, cela ne signifie pas que cette « organisation » soit italienne ou grecque étant donné qu’aujourd’hui ont déjà été revendiquées sous le sigle FAI/FRI des attaques dans des pays des cinq continents (Indonésie, Chili, Mexique, USA, Argentine, Bolivie, Grèce, Italie, Royaume Uni, Russie…).

On a aussi pu lire d’autres sottises dans les « nouvelles » d’autres moyens de communication comme le journal El Mundo qui affirme, dans son reportage sur cette affaire publié en version digitale, que certaines des personnes arrêtées sont (je copie-colle textuellement) « membres du groupe radical anarchiste Bloque Nero (Black Block) de Madrid ». J’aimerais bien savoir quand est-ce que le Black Block a cessé d’être une tactique militante pour les manifestations massives (utilisée par différents courants et mouvements, dont des anarchistes et autonomes mais aussi des néonazis) pour se transformer en un groupe anarchiste avec des membres et tout ça. Sérieux, expliquez moi.

Dans le même article de El Mundo, il est dit que le secrétaire d’État Francisco Martínez a annoncé que cette opération serait « une opération de plus de la lutte contre tous les types de terrorisme ». On voit qu’il a toutefois oublié de combattre le terrorisme de l’État, celui qui expulse de leurs maisons des milliers de familles, celui qui élabore des montages ridicules pour incarcérer et séparer de nous nos ami-e-s et compagnon-ne-s, celui que torture et tue dans les commissariats et les prisons, celui qui noie les migrants dans le Détroit [de Gibraltar] et légalise les expulsions expéditives, celui qui bombarde des pays étrangers en tuant des villages entiers pour du pétrole et des bénéfices, celui qui protège les infrastructures qui dévastent la Terre et achève le peu de nature qui nous reste, dans un monde aseptisé et artificiel de câblages et d’autopsies où nos rêves se précipitent à Haute Vitesse dans le vide.

Dans tous les cas, nous n’attendons rien de vous. Nous ne nous faisons pas d’illusions sur un quelconque changement qui ne sorte pas de notre auto-organisation et élévation. L’État, le Capital, l’Autorité sous toutes ses formes et expressions, internes et externes à nous-mêmes, sont nos ennemis dans une guerre qui n’a fait que commencer.

Nous ne tomberons pas dans un victimisme pathétique, ni dans la valorisation de l’innocence ou de la culpabilité de nos compagnon-ne-s. Qu’ils/elles soient « innocent-e-s » ou « coupables », nous les voulons libres. Nous les voulons à nos côtés. Nous voulons qu’elles/ils luttent et ne baissent pas la tête, qu’ils voient le sens de la solidarité et de la cohérence entre la pensée et les actes et qu’ils choisissent le chemin difficile parce que c’est celui qui est juste et qu’ils ne supportent pas ce monde encagé. Nous les voulons libres parce qu’ils/elles sont des nôtres, connu-e-s ou inconnu-e-s. Nous les voulons libres parce que ce sont eux/elles mais que ça aurait pu être nous, quiconque parmi ceux qui observent une société construite sur l’injustice et la misère et ne peuvent pas ni ne veulent détourner les yeux.

Des temps difficiles approchent, la Loi Mordaza [3] et la réforme du Code Pénal, récemment approuvées de manière définitive, nous assurent un futur plein de pénurie et de répression. Ils nous veulent silencieux/ses, à genoux, soumis-es, terrorisé-e-s, parce qu’à un moment où leur éternité chancelle et qu’ils n’ont plus ETA pour justifier leurs abus répressifs, ils ont besoin de nouvelles menaces fantômes. Les anarchistes, le fondamentalisme islamiste, peu leur importe, parce que l’objectif est de créer de nouveaux ennemis internes à la sacro-sainte Démocratie pour effrayer la population et justifier ainsi l’augmentation exponentielle de la présence policière dans les rues, des contrôles et des intrusions dans nos vies, leurs atrocités et leurs restrictions, parce qu’un fiasco comme celui-là ne peut se maintenir que par la peur et les mensonges. Goya a dit que « le rêve de la raison engendre des monstres ».

Cependant, au-delà des difficultés posées, nous nous rencontrons, nous nous connaissons, nous partageons des moments de désobéissance et de négation de l’ordre existant, et nous continuons à avancer, en nous rendant forts, en perdant la peur petit à petit et en cessant de contenir nos larmes pour transformer la tristesse et l’impuissance en rage. Parce que la lutte et la révolte sont le seul chemin…

À bas les murs des prisons !
Tout continue !
Solidarité partout avec tou-te-s les prisonnier-e-s en lutte !


[Traduit de l’espagnol par nos soins de Vozcomoarma.]


Notes

[1] Audiencia Nacional : Tribunal espagnol spécialisé pour les affaires importantes et crimes graves, par exemple relevant de la loi antiterroriste. Il siège à Madrid. NdT

[2] Ici le texte original contient un jeu de mots ironique intraduisible : le mot espagnol periodista signifiant journaliste a été déformé en « perio-listos », listo signifiant « intelligent ». NdT

[3] Littéralement « Loi Bâillon », surnom de la loi appelée par l’État espagnol « loi sur la sécurité citoyenne » établissant une série d’amendes à distribuer à tour de bras pour réprimer toute conflictualité. NdT

http://sous-la-cendre.info/3169/operati ... en-espagne
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Re: Espagne

Messagede Pïérô » 07 Avr 2015, 18:03

Espagne : l’antiterrorisme contre le mouvement ouvrier

Le renforcement des lois terroristes, la Ley mordaza passée en décembre, tout criminaliser la présence dans la rue et faciliter la répression expéditive, financière et carcérale.

David Santamaria, syndicaliste CGT-E à Barcelone, et Alfon, chômeur à Madrid, sont venus témoigner à Nantes de la répression du mouvement social en Espagne, dans le cadre d'une semaine contre les violences d’État, policières et judiciaires, mais aussi administratives contre les migrants.

« Mon exemple montre comment la police réprime des militants révolutionnaires à travers des peines très lourdes » explique Alfonson Fernández Ortega, dit Alfon, chômeur de 22 ans du quartier ouvrier de Vallecas, bastion de luttes dans le sud de Madrid.« Le 14 novembre 2012, jour de grève générale, j'ai été arrêté dans mon quartier de Vallecas. Je sortais de chez moi avec mon amie pour aller jusqu'à mon piquet de grève. Après l'arrestation, un policier a porté un sac en plastique contenant des composants à même de réaliser une bombe artisanale. On a donc dit que ce sac était à moi, et que je voulais faire sauter un distributeur de billets. La police en a profité pour interroger des militants du milieu anticapitaliste, pour perquisitionner chez ma mère, au local de mon groupe de supporters* du Rayo Vallecano, le club de foot local ». Un montage grossier. Sans preuve, sans qu'on trouve ses empreintes sur le fameux sac, il est jeté en prison. Une forte mobilisation syndicale et antifa l'a fait sortir au bout de 56 jours d’enfermement. Début janvier, Alfon a été condamné à 4 ans de prison ferme pour l’accusation de « possession d’explosif ». Toujours sans preuve, malgré trois perquisitions, malgré les contradictions des policiers affirmant qu'Alfon détenait le fameux sac en plastique de l'accusation.

Le régime FIES

Après deux heures d'interrogatoire par des agents aux visages cachés, Alfon a été placé en prison préventive, sous le régime FIES ­(Fichiers internes de suivi spécial des prisonniers signalés). Un système inspiré d'une visite d'un ministre espagnol socialiste en Israël en 1987 et mis en application depuis 1996. Ce qui place le détenu spécial en quartier de haute sécurité. C'est une prison dans la prison. Le but est de freiner les solidarités entre prisonniers. La liberté conditionnelle ne s'applique qu'au trois quart de la peine, pas à la moitié. « Certaines cellules sont hermétiques et le détenu passe plusieurs jours dans 20 à 50 cm d'eau… » Les communications vers l'extérieur très filtrées, tous les écrits interceptés et photocopiés, livres, journaux contrôlés, refusés. « Voir un médecin exige une autorisation. Certains détenus sont morts en attendant l'autorisation… » Lors des visites de la famille, le détenu est enfermé dans une cage, en présence d'un policier, toute la conversation à travers une vitre étant enregistrée. Mais le système répressif carcéral peut encore se renforcer : « La loi antiterroriste créée contre l'ETA et les GRAPO s'est appliquée aux antifascistes et aux syndicalistes, mais elle pourrait être revue depuis les attentats à Paris contre Charlie hebdo. Tout ça pour rassurer les citoyens, alors qu'un sondage a déterminé que seuls 0,05% des Espagnols ont peur du terrorisme, dit David. L'antiterrorisme est le principal instrument de soumission du mouvement ouvrier. D'où l'importance de faire front commun internationalement ».

Condamné, l’État espagnol s'en fout

« En dix ans, 6600 cas de torture ont été dénoncés et 752 condamnations ont été prononcées. L'Espagne est condamnée tous les ans par l'Europe pour torture, mais ça ne sert à rien, dit David Santamaria. Le tribunal constitutionnel espagnol a aussi déclaré illégal le régime Fies, mais sans suite non plus. Il n'y a aucune trace officielle du nombre de morts dans les institutions. Le gouvernement espagnol fait ce qu'il veut. Quand des militants de l'ETA ont purgé leur peine en Allemagne ou en France, et qu'il avaient fini leur peine, l'Espagne les a remis en prison quand ils sont rentrés chez eux ». Quant au mouvement qui a réussi à faire interdir les « balas de goma », -les flashballs tiré par des fusils- il n'y a pas forcément gagné au change, l'armement des policiers ayant opté pour les LBD 40 français, lanceurs de balle de défense dont le pouvoir de mutilation n'est plus à démontrer. Par ailleurs 340 tasers sont en expérimentation.

* Bukaneros 92, groupe de supporters anarchistes et antifa.

–----------

La ley mordaza

Votée par la droite en décembre 2014, la « Loi organique de protection de la sécurité citoyenne », est dite Ley Mordaza (loi bâillon), tant sont nombreuses les limitations des libertés individuelles et collectives sanctionnée de lourdes amendes et de peine de prison. Une partie sans passer par un juge. En traitement automatique, administratif hors de tout cadre judiciaire qui permet une defense. Une cinquantaine de fautes, jusqu’ici incluses dans le Code pénal (donc sanctionnées par une action judiciaire), sont désormais punies par des amendes administratives, contestables uniquement après coup : c’est-à-dire que l’intervention judiciaire d’un avocat ou un juge ne pourra se faire qu’a posteriori.

Ce qui légalise l'expulsion immédiate (sans passer par la case juge) pour les migrants à la frontière avec le Maroc. Autre tarifs applicables : de 30 000 à 600 000 € d'amendes pour des manifs aux abords d'infrastructures de services de base (exemple : une centrale nucléaire). De 600 à 30 000 € pour des manifs près de bâtiments sensibles de l’État (genre le Parlement après les manifs Rodea el Congreso), pour participation à une action contre une expulsion de logement, pour refus de présenter ses papiers d'identité à un flic. De 100 à 600 € pour avoir pris en photo ou filmé un policier, pour manque de respect envers un policier, pour occupation d'agences bancaires, pour sanctionner la top-manta, vente-ambulante qui cible directement les migrants, ou les escraches, manifs pacifiques sur le lieu de travail de ceux qu'on dénonce afin de faire pression : entrer en chantant dans une banque peut valoir jusqu’à 600 €.

Nicolas Delacasiniere,
(Syndicat CNT Interco Nantes et Région)

http://www.cnt-f.org/international/Espa ... vrier.html
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Re: Espagne

Messagede Pïérô » 12 Avr 2015, 03:41

Récupérons l’Athénée encyclopédique populaire !
Espagne : recuperem l’Ateneu

« Récupérons l’Athénée encyclopédique populaire », c’est le nom de la campagne lancée par Manel Aisa Pámpols 1 et ses camarades, bien décidés à obtenir enfin un local répondant aux besoins d’une structure permettant d’archiver une nombreuse documentation ouvrière et d’organiser conférences, débats et spectacles pour préserver et divulguer la mémoire sociale de Barcelone. La campagne a été lancée sous le double slogan de « Papel Quemado » (papier brûlé) faisant référence au saccage des locaux de l’AEP par les troupes franquistes et à la période 1939-1977, et « Papel Mojado » (papier mouillé, expression équivalente à « lettre morte ») pour les années 1977-2014.

L’histoire de l’Ateneu enciclopédic popular (AEP) a déjà fait l’objet d’un article de Manel Aisa Pámpols, traduit dans Le Monde libertaire 2. Rappelons simplement que l’AEP de Barcelone fut fondé en 1902 par des ouvriers et des intellectuels, passionnés de littérature, assoiffés de culture et ayant des visées pédagogiques et revendicatives envers la société en place. La déclaration de principe était la suivante : « Le premier but de l’Athénée encyclopédique populaire est l’instruction de ceux qui, travaillant de leurs mains, en sont le plus privé, et ensuite la transformation en une véritable université populaire. » Son objectif était donc clairement de conscientiser la classe ouvrière en ouvrant des bibliothèques et athénées populaires avec l’aide d’étudiants et d’artistes qui croyaient en l’instruction du peuple. C’est ainsi qu’on développa un large éventail d’activités : il y avait des sections littérature, beaux-arts, sciences naturelles, économie…
On y dispensait des cours du soir (grammaire, calcul, comptabilité, dessin industriel, solfège, piano…). Les activités sportives n’étaient pas délaissées : athlétisme, natation, lutte gréco-romaine, boxe (l’AEP fut le premier siège de la Fédération espagnole de boxe). Également des cours de gymnastique à destination des femmes afin d’en préserver « la santé, la jeunesse et la beauté », sans oublier la pratique pour tous du naturisme et du nudisme avec le groupe des Amics del Sol (Amis du soleil), organisateurs de randonnées… Jusqu’aux années 1930, l’AEP eut un rôle prépondérant dans les luttes urbaines. Son siège abritait groupes clandestins et syndicats (CNT). L’AEP regroupait ainsi ce qu’on pouvait qualifier de « gauche démocratique et laïque », ce qui allait de l’anarchisme au catalanisme et au républicanisme. Son fonctionnement était uniquement financé par les cotisations de ses adhérents. À noter à ce sujet que, dans les années 1920 et 1930, il compta jusqu’à 25 000 membres (pour celles et ceux qui aiment les comparaisons, à la même époque le Football Club de Barcelone, le fameux Barça, n’avait que 3 000 supporteurs !).

Influence de l’AEP

L’Athénée fut aussi une référence dans les milieux culturels. En 1935, il organisa au Théâtre de Barcelone une soirée en hommage à la révolte des Asturies qui avait eut lieu l’année précédente ; soirée animée par la comédienne Margarida Xirgu et Federico García Lorca, qui y déclamèrent des poèmes. Outre ces deux personnalités, et sans compter la multitude d’ouvriers adhérents, nombre d’intellectuels et politiques fréquentèrent l’AEP ; citons simplement : Eladi Gardó étudiant en philosophie et Francesc Layret, étudiant en droit, tous deux fondateurs de l’Athénée, León Felipe le poète, Lluís Companys, avocat et futur président de la Generalitat 3, Andreú Nin et Joaquín Maurín, membres de la CNT et futurs fondateurs du Poum 4, Victor Alba, membre lui-aussi du Poum et rédacteur en chef de son journal La Batalla, Angel Pestaña et Salvador Segui, membres et dirigeants de la CNT de Catalogne, Carles Fontseré, célèbre affichiste et créateur du logo de l’AEP, et beaucoup d’autres personnalités libertaires ou de la sphère progressiste. La première vie de l’AEP s’interrompit le 26 janvier 1939 quand, au bout de près de trois ans de guerre civile, les troupes de Franco entrèrent dans Barcelone. Le premier édifice non officiel qui sera occupé par la soldatesque fasciste sera celui de l’AEP. Les quatre étages du siège et les meubles seront saccagés ; les livres et la documentation seront jetés dans la rue pour y être brûlés dans la tradition des autodafés de l’Inquisition et des systèmes totalitaires. Les franquistes inauguraient ainsi la purge culturelle et idéologique qui allait s’étendre à tout le pays, mettant à exécution la menace que le général factieux Emiliano Mola avait proférée au début du soulèvement fasciste : « Il faut en finir avec la culture ouvrière. »

La seconde vie de l’Athénée encyclopédique populaire

Il faudra attendre 1977 (deux ans après la mort du dictateur Franco) pour voir renaître l’AEP, qui occupera successivement différents locaux dans Barcelone, en attendant la restitution de son siège. Restitution non effectuée à ce jour, malgré un accord intervenu en 2009 puis ratifié en 2011 entre les responsables de l’AEP et la Ville de Barcelone, qui s’engageait à attribuer un local dans le quartier du Raval 5, et ceci avant la fin de la mandature du maire Jordi Hereu (socialiste), auquel a succédé depuis, Xavier Trías (social-libéral). Officiellement d’après ce dernier, si l’accord approuvé à l’unanimité en mai 2011 n’a pas encore été concrétisé, c’est par « manque de locaux adéquats », ceci malgré le fait reconnu que l’AEP est l’institution de mémoire sociale la plus ancienne de Catalogne. On y conserve actuellement 25 000 livres et 12 000 journaux et documents de grande valeur historique et artistique, une abondante documentation libertaire, syndicale et républicaine. On y conserve aussi la dernière lettre écrite par le guérillero Quico Sabaté, des dizaines de livres de la bibliothèque personnelle de Francisco Ferrer i Guardia et ayant servi à la fondation de son École moderne ; tout cela se trouve pour le moment dans un appartement trop exigu situé 26, passage Sant Joan, au-dessus de la bibliothèque Arus. Également, bien sûr, des affiches éditées pendant la période 1936-1939, ainsi que de nombreux récits et témoignages, écrits de prisonniers républicains dans la période post-guerre ; sont aussi conservées là les archives du MIL (Mouvement ibérique de libération), groupe armé anarchiste auquel appartenait Salvador Puig Antich, un des derniers exécutés par garrot vil sous Franco en 1974. Bref, toutes ces archives se trouvent actuellement dans un appartement mal adapté, mal protégé, et qui fut d’ailleurs cambriolé en 2012 6 ; parmi les objets dérobés figuraient plusieurs originaux dont la célèbre affiche due à Pere Catalá i Pic : « Aixafem el feixisme » (écrasons le fascisme).

Quarante ans de spoliation

2015 : quatre décennies de « démocratie » n’ont toujours pas été suffisantes pour donner à cette entité de la mémoire sociale un siège répondant à ses besoins. Les promesses d’un maire de centre-droit succèdent aux promesses d’un maire de gauche. En quoi consistaient ces promesses ? La mairie de Barcelone s’était engagée à fournir à l’Athénée encyclopédique populaire un local pour son siège d’une superficie de 750 à 1 000 m2, comprenant au moins un rez-de-chaussée, le tout pour un loyer annuel de 650 euros environ, et devant être situé dans Ciutat Vella (la vieille ville) ou tout proche (le quartier historique du Raval faisant partie de Ciutat Vella). Paroles, paroles, mais rien ne bouge. Les animateurs de l’AEP, las d’attendre, ont donc décidé de lancer cette opération « Récupérons l’Athénée » le 26 janvier, date non fortuite puisqu’elle correspond à l’entrée, soixante-seize ans auparavant, des nationaux 7 dans Barcelone. Hasard des circonstances, la municipalité inaugurait le 7 février dernier le nouveau Museu de les cultures del món (musée des Cultures du monde, un peu l’équivalent du musée des Arts premiers à Paris). Tout le gratin de la bourgeoisie catalane et l’équipe municipale étaient évidemment présents. L’occasion était donc trop belle pour Manel Aisa Pámpols et ses camarades d’organiser un rassemblement devant ce nouveau musée et de leur rappeler les promesses non tenues. Plus d’une centaine de manifestants armés de pancartes et de sifflets ont apostrophé le maire en lui rappelant qu’« on ne peut pas parler de cultures du monde et abandonner l’institution de culture ouvrière la plus importante de la ville ».

Épilogue ?

Devant la détermination de celles et ceux qui n’oublient ni le passé ni les accords signés en 2011, les responsables de l’AEP ont été reçus en urgence à la mairie de Barcelone par le conseiller municipal à la culture, Jaime Ciurena, flanqué des conseillers à l’habitat et au patrimoine. Après d’âpres et longues discussions, de nouvelles propositions ont été faites. « Miraculeusement » sont apparus et ont été proposés deux locaux distants chacun de cinquante mètres et situés tous les deux dans le quartier du Raval. L’un de 270 m2 dans un immeuble neuf, l’autre de 400 m2 plus un patio. Les négociations continuent pour éventuellement retenir l’un des deux ou attendre d’autres propositions, mais on peut faire confiance à nos camarades : ils ne lâcheront rien et récupéreront un local digne de ce nom pour en faire le siège de l’Athénée encyclopédique populaire.


1. Président de l’Athénée encyclopédique populaire et auteur d’articles et ouvrages sur les luttes sociales à Barcelone. Dernier livre publié : La huelga de los alquileres y el comité de defensa económica (La grève des loyers et le comité de défense économique).
2. Voir Le Monde libertaire hors-série n° 43 (22 décembre 2011 au 22 février 2012).
3. Gouvernement de la Catalogne.
4. Parti ouvrier d’unification marxiste (communistes non staliniens).
5. Anciennement surnommé Barrio Chino (quartier chinois). Quartier « chaud » de Barcelone, célèbre pour ses tavernes, ses prostituées, ses artistes (notamment Picasso) ou ses héros de romans (comme le détective privé Pepe Carvalho de Manuel Vázquez Montalbán)… C’est également dans ce quartier qu’en 1923 fut assassiné par les pistoleros du patronat le leadeur cénétiste Salvador Seguí.
6. Voir Le Monde libertaire n° 1662 (du 1er au 7 mars 2012).
7. Les partisans du putsch militaire antirépublicain étaient communément dénommés « los nacionales » (les nationaux) par les républicains antifascistes.

Ramon Pino

http://www.monde-libertaire.fr/internat ... em-lateneu
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Re: Espagne

Messagede bipbip » 14 Avr 2015, 12:12

Espagne : des hologrammes contre la «loi du bâillon»

Pour protester contre une loi de sécurité citoyenne restreignant les libertés publiques, une centaine d'organisations appellent à manifester virtuellement.

Manifester à l’aide d’hologrammes : c’est l’appel que viennent de lancer une centaine d’organisations citoyennes en Espagne pour protester contre la loi organique de sécurité citoyenne du gouvernement conservateur de Mariano Rajoy. Un texte adopté par le Congrès des députés jeudi dernier et qui porte atteinte à certaines libertés fondamentales.

... http://www.liberation.fr/monde/2015/03/ ... on_1232304


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Re: Espagne

Messagede geronimo355 » 30 Mai 2015, 06:46

La revue libertaire Argelaga (fondée par Miguel Amoros) vient de publier ce texte sur l'essor des mouvements citoyennistes : https://argelaga.wordpress.com/2015/05/ ... s-panicos/

La peste citoyenne. La classe moyenne et ses angoisses

Que l'économie et la politique marchent main dans la main est une chose connue. La conséquence logique d'une telle relation est que la politique réelle se doit d'être fondamentalement économique: à l'économie de marché correspond une politique de marché. Les forces qui dirigent le marché mondial, dirigent de facto la politique des États, à l'extérieur aussi bien qu'à l'intérieur, ainsi qu'au niveau local. La réalité est la suivante : la croissance économique est la condition nécessaire et suffisante pour la stabilité sociale et politique du capitalisme. En son sein, le système de partis évolue selon le rythme du développement. Lorsque la croissance est importante, le système tend vers le bipartisme. Lorsqu'elle ralentit ou entre en récession, comme si elle obéissait à un mécanisme homéostasique, le panorama politique se diversifie.

Le capital, qui est une relation sociale initialement basée sur l'exploitation du travail, s'est approprié de toutes les activités humaines, envahissant toutes les sphères : culture, science, art, vie quotidienne, loisirs, politique... Que le moindre recoin de la société soit envahi par la marchandise signifie que tous les aspects de la vie fonctionnent selon des directives marchandes, ou ce qui revient au même, que toute activité humaine est gouvernée par la logique capitaliste. Dans une société-marché ayant de telles caractéristiques, il n'y a pas de classes au sens classique du terme (mondes séparés qui s'affrontent), mais plutôt une masse plastique où la classe capitaliste - la bourgeoisie - s'est transformée en strate exécutive sans titre de propriété, tandis que son idéologie s'est universalisée. Ses valeurs dirigent toutes les conduites sans exception. Cette forme particulière de déclassement général ne se traduit pas par une inégalité sociale diminuée; bien au contraire, elle est beaucoup plus accentuée, mais même avec l'aiguillon de la pénurie, l'inégalité est perçue de façon moins intense et donc n'entraîne pas de conflits. Le mode de vie bourgeois a inondé la société, annulant la volonté de changement radical. Les salariés ne veulent pas d'un autre style de vie, ni d'une autre société; tout au plus, souhaitent-ils une meilleure position sociale avec un pouvoir d'achat accru. L'antagonisme violent se déplace dans les marges : la contradiction majeure est moins dans l'exploitation que dans l'exclusion. Les principaux protagonistes du drame historique et social ne sont plus les exploités du marché, mais les expulsés et ceux qui refusent d'y entrer : ceux qui se situent hors du "système" en tant qu'ennemis.

La société de masse est une société uniformisée mais fortement hiérarchisée. L'élite dirigeante n'est pas formée par une classe de propriétaires ou de rentiers mais par une véritable classe de gestionnaires. Le pouvoir dérive donc de la fonction, non de la propriété. Le pouvoir de décision se concentre tout en haut de la hiérarchie sociale; la dépossession, sous forme d'emploi précaire et d'exclusion, se concentre dans la partie la plus basse. Les couches intermédiaires, enfermées dans leur vie privée, ne sentent ni ne souffrent, simplement elles consentent. Cependant, quand la crise économique les atteint, elle les tire vers le bas. Alors, ces strates appelées classes moyennes par les sociologues sortent de cet immobilisme qui est la base du système des partis, contaminent les mouvements sociaux et prennent des initiatives politiques qui se concrètisent par l'apparition de nouveaux partis. L'objectif n'est évidemment pas l'émancipation du prolétariat, ou une société libre de producteurs libres, ou le socialisme. L'objectif est bien plus prosaïque puisqu'il s'agit uniquement de venir au secours de la classe moyenne, c'est-à-dire, à sa déprolétarisation par la voie politico-administrative.

L'expansion du capitalisme, sur le plan géographique et social, entraîna l'expansion de secteurs salariés liés à la rationalisation du processus de production, à la tertiarisation de l'économie, à la professionnalisation de la vie publique et à la bureaucratisation étatique : fonctionnaires, conseillers, experts, techniciens, employés, journalistes, professions libérales, etc. Leur statut reposait sur la préparation académique, et non sur la propriété de leurs moyens de travail. La social-démocratie allemande classique vit dans ces nouvelles "classes moyennes" un facteur de stabilité qui rendait possible une politique réformiste, modérée et graduelle, et il est clair, un siècle plus tard, que son extension a permis que le processus de globalisation atteigne sa limite sans trop de difficultés. La croissance exponentielle du nombre d'étudiants fut le signe le plus éloquent de sa prospérité; alors que le chômage des diplômés a été l'indicateur le plus clair de la dévalorisation des études et, en conséquence, le thermomètre de sa soudaine prolétarisation. Sa réponse à cette dégradation n'adopte évidemment pas des traits anticapitalistes, totalement étrangers à sa nature. Elle se concrétise dans une modification modérée de la scène politique qui ravive le réformisme d'antan, centriste ou social-démocrate, appelé pompeusement "assaut aux institutions".

La classe moyenne, qui se trouve au centre de la fausse conscience moderne, ne peut donc pas se contempler en tant que telle; selon elle, sa condition est générale. Elle voit tout selon sa propre optique particulière exacerbée par la crise; ses intérêts sont ceux de toute la société. Sociologiquement, tout le monde appartient à la classe moyenne, ses idéologues s'expriment dans le langage en papier mâché de Negri, Gramsci, Foucault, Deleuze, Derrida, Baudrillard, Bourdieu, Zizek, Mouffe, etc. Selon eux, le "grand événement", la faillite du régime capitaliste, est une chose qui n'arrivera jamais. La révolution est un mythe auquel il vaut mieux renoncer en faveur d'une contestation réaliste qui fomente la participation citoyenne à travers les réseaux sociaux, c'est-à-dire, la rabâchée "dialectique de contre-pouvoir", mais qui ne doit pas stimuler le changement révolutionnaire. Politiquement, tout le monde est citoyen, donc membre d'une communauté électrovirtuelle d'électeurs, et en conséquence, doit se passionner pour les élections et les nouvelles technologies. Crétinisme idéologique post-moderne d'un côté, crétinisme parlementaire technologiquement assisté de l'autre, mais crétinisme qui croit au pouvoir. Sa conception du monde l'empêche de contempler les conflits sociaux comme lutte des classes; pour elle, ceux-là sont un simple problème de redistribution, une question d'ajustement budgétaire dont la solution est du ressort de l'État, et qui, par conséquent, dépend de l'hégémonie politique des formations qui la représentent. La classe moyenne post-moderne reconstruit son identité politique en opposition, non pas au capitalisme, mais à la "caste", en d'autres termes, à l'oligarchie politique corrompue qui a fait de l'État son patrimoine. Les autres protagonistes de la corruption, banquiers, entrepreneurs et syndicalistes, restent au second plan. La classe moyenne est une classe couarde, tenaillée par la peur, ce qui fait qu'elle cherche à se faire des amis plutôt que des ennemis, mais avant tout elle cherche à ne pas déséquilibrer les marchés; l'ambition et la vanité apparaîtront avec la sécurité et le calme que dispensent le pacte politique et la croissance. En se constituant sujet politique, son ardeur de classe se consume en entier devant la perspective du parlementarisme; la bataille électorale est la seule qu'elle pense livrer, et celle-ci se déroule dans les medias et les urnes. Dans ses schémas il n'y a pas de place pour la confrontation directe avec ce qui est à l'origine de sa peur et de ses angoisses - le pouvoir de la "caste" - puisqu'elle ne souhaite que rétablir son statut d'avant 2008, réforme qui passe par une réappropriation des institutions, non par leur liquidation.

Le concept de "citoyenneté" offre un succédané identitaire là où la communauté ouvrière a été détruite par le capital. La citoyenneté est la qualité du citoyen, un être doté du droit de vote dont les adversaires semblent n'être ni le capital ni l'État, mais plutôt les vieux partis majoritaires et la corruption, les grands obstacles du sauvetage administratif de la classe moyenne reléguée. L'idéologie citoyenniste, à l'avant-garde du recul social, n'est pas une variante rénovée de l'ouvriérisme stalinoïde; il s'agit plutôt de la version post-moderne du radicalisme bourgeois. Elle ne se reconnaît même pas dans l'anticapitalisme, qu'elle considère périmé, mais plutôt dans le libéralisme social plus ou moins populiste. C'est ainsi parce qu'elle a pris comme point de départ la vie dégradée des classes moyennes et ses aspirations réelles, même si elle s'appuie sur les masses en risque d'exclusion trop désorientées pour agir de façon autonome, de même que les mouvements sociaux, trop faibles pour croire possible et encore moins désirable une réorganisation de la société civile en marge de l'économie et de l'État. Sur ce point, le citoyennisme est le fils putatif du néostalinisme raté et de la social-démocratie bloquée. Le programme citoyenniste est un programme de parvenus, très malléable et politiquement correct jusqu'à la nausée, un programme idéal pour arrivistes frustrés et aventuriers politiques au chômage. Les principes n'ont pas d'importance, sa stratégie est consciemment opportuniste, avec des objectifs uniquement à court terme, parfaitement compatibles avec des pactes qui le jour précédant les élections auraient été considérés comme contre nature.

Dans aucun programme citoyenniste ne figurent la socialisation des moyens pour la vie, l'autogestion généralisée, la suppression de la spécialisation politique, l'administration par les conseils, la propriété communale ou la distribution équilibrée de la population dans le territoire. Les partis et alliances citoyennistes ne proposent qu'une simple répartition des revenus afin d'élargir la base bourgeoise, ils luttent pour des budgets institutionnels qui freineraient les privatisations, élimineraient les coupes budgétaires et atténueraient la précarité du travail, que ce soit par la création de petites entreprises ou par la cooptation d'une majorité sous-employée de diplômés dans les tâches administratives, intentions qui ne sont pas rupturistes. Ils n'arrivent pas dans l'arène politique en tant que subversifs mais comme animateurs; ils ne sont pas sérieux lorsqu'ils disent vouloir changer la constitution de 1978. Ils n'ont pas encore mis un pied dans l'arène que déjà ils font étalage de réalisme et modération, brandissant le drapeau monarchique et tendant la main à la "caste" vilipendée. Ils sont conscients qu'une fois consolidés comme organisations et en possession d'un capital médiatique suffisant, l'étape suivante sera une gestion de ce qui existe plus claire et efficace qu'auparavant. Aucune mesure déstabilisatrice ne leur convient car les leaders citoyennistes doivent prouver que l'économie fonctionnera plus harmonieusement si ce sont eux qui sont aux commandes du vaisseau étatique. Forcément, ils doivent se présenter comme l'espérance de sauvetage pour l'économie, c'est pourquoi leur projet identifie progrès avec productivité et postes de travail. Il s'agit donc d'un projet productiviste qui cherche la croissance industrielle et technologique, créant des emplois, redistribuant les revenus et augmentant les exportations, soit en recourant à des réformes du système fiscal, soit en exploitant de façon intensive les ressources territoriales, tourisme inclus. Le moins important est que les emplois soient utiles socialement et répondent à des besoins authentiques. Le réalisme économique commande et complète le réalisme politique : rien ne doit rester en dehors du champ politique et rien en dehors du marché, tout pour le marché.

Le relatif essor du citoyennisme, avec ses variantes nationalistes, démontre la profondeur insuffisante de la crise économique qui, loin d'éclairer les divisions sociales et les causes de l'oppression donnant lieu à une protestation consciente et organisée qui se proposerait la destruction du régime capitaliste, a permis à d'autres de les dissimuler grâce à une fausse opposition qui loin de questionner le système de domination le renforce. Une crise qui est donc restée à mi-chemin, sans déchaîner des forces radicales. Cependant, les crises vont continuer et à long terme leurs conséquences ne pourront pas être camouflées comme question politique et finiront par émerger comme question sociale. Tout dépendra du retour de la lutte sociale véritable, éloignée des media et de la politique, parcourue d'initiatives nées dans les secteurs les plus déracinés parmi les masses, parmi ceux qui ont peu à perdre s'ils décident de couper les liens qui les rattachent au destin de la classe moyenne. Mais ces secteurs potentiellement anti-système paraissent aujourd'hui épuisés, sans force pour s'organiser de façon autonome, incapables de s'ériger en sujet indépendant, et c'est ainsi que le citoyennisme a le champ libre, frappant doucement à la porte des parlements et des mairies afin qu'on les laisse entrer. C'est la tragi-comédie de notre temps.

Argelaga, 30 avril 2015


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Re: Espagne

Messagede bipbip » 04 Juin 2015, 02:02

Espagne : 3 des 5 anarchistes arrêtés dans l’opération "Piñata" remis en liberté

L’Audiencia Nacional a remis en liberté trois membres supposés des Groupes Anarchistes Coordonnés (GAC) arrêtés en avril dernier au cours de l’opération Piñata, arguant que le juge n’avait pas suffisamment motivé l’envoi en prison pour délits d’appartenance à une organisation terroriste. Javier García Castro, Enrique Balaguer Pérez et Jorge Linares Izquierdo avaient fait appel de cette mesure. Leur remise en liberté se fonde sur le "manque de caractère concret des indices" (vu notamment l’aspect générique des degrés d’implication dont ils sont accusés) et sur le fait qu’il n’y a pas de risque sérieux de fuite vu leurs attaches familiales et salariales en Espagne.

Par ailleurs les juges affirment que les liens ne sont pas établis (prouvés) entre les GAC et la Fédération Anarchiste Informelle (FAI). Les trois anarchistes sont néanmoins placés sous contrôle judiciaire avec obligation de pointer tous les 15 jours, retrait du passeport et interdiction de sortir du pays. 15 personnes avaient été inculpées dans le cadre de l’opération Piñata, 5 avaient été mis en détention préventive.

http://www.secoursrouge.org/Espagne-3-d ... en-liberte
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Re: Espagne

Messagede bipbip » 06 Juin 2015, 18:47

Espagne: trois des cinq compagnons incarcérés suite à l’Opération Piñata sortent de prison + quelques nouvelles de l’Opération Pandora

Madrid (EFE), 1er juin 2015 – L’Audiencia Nacional a remis en liberté trois membres supposés des Groupes Anarchistes Coordonnés (GAC) arrêtés en avril dernier au cours de l’opération Piñata[1], arguant que le juge Eloy Velasco n’avait pas suffisamment motivé l’envoi en prison pour délits d’appartenance à une organisation terroriste.

Javier García Castro, Enrique Balaguer Pérez et Jorge Linares Izquierdo avaient fait appel de cette mesure. Leur remise en liberté se fonde sur le « manque de caractère concret des indices » (vu notamment l’aspect générique des degrés d’implication dont ils sont accusés) et sur le fait qu’il n’y a pas de risque sérieux de fuite vu leurs attaches familiales et salariales en Espagne.

Par ailleurs les juges affirment que les liens ne sont pas établis (prouvés) entre les GAC et la Fédération Anarchiste Informelle (FAI), considérée comme terroriste par la l’Union Européenne.

Les trois anarchistes sont néanmoins placés sous contrôle judiciaire avec obligation de pointer [tous les 15 jours], retrait du passeport et interdiction de sortir du pays[2].


Notes:
[1 ]Ndt – Qui a conduit le 1er avril 2015 à 15 mises en examen (10 à Madrid, 3 à Barcelone et 2 à Palencia) pour « association terroriste » à caractère « anarchiste insurrectionaliste », dont cinq (et maintenant deux) incarcérations préventives. Ces cinq compagnons avaient commencé à être transférés le 18 mai dans différentes prisons loin de Madrid (dont Enrique il y a quelques jours à peine de Madrid à Villena, Alicante).
[2] On remarquera avec joie que contrairement aux sept compagnons de Catalogne de l’Opération Pandora relâchés contre le paiement d’une caution de 3000 euros par tête fin janvier 2015, aucun racket étatique de ce type n’a été imposé à ces trois-là.

http://fr.squat.net/2015/06/04/espagne- ... dora-news/
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Re: Espagne

Messagede bipbip » 07 Juin 2015, 14:37

Espagne : bipartisme, adios

Pour un coup de pied au cul, ça a été un bon coup de pied au cul ! Même si nous sommes sceptiques devant l'illusion électoraliste et le parlementarisme participant à la conquête du pouvoir, le résultat des élections municipales du 24 mai en Espagne donne au moins la satisfaction de constater la déconfiture des deux « grands » partis : PP et PSOE 1, qui ont été abandonnés par une large frange de leurs électeurs habituels au profit des listes d'alliances apparues depuis un peu plus d'un an. Le PP notamment a perdu 2,5 millions de voix par rapport à 2011. Nombre de ses candidats ont annoncé leur décision d'abandonner la politique (sans doute une nouvelle promesse qui ne sera pas tenue). Le PP avait pourtant essayé de limiter la casse en multipliant les tracasseries pour empêcher au maximum les votes par correspondance de tous les migrants espagnols victimes de sa politique économique (ils sont environ 1,8 million de par le monde), mais rien n'y a fait.

Si le PP reste majoritaire à l'échelon national avec 27 % des suffrages, il est battu ou en difficulté dans de nombreuses grandes localités. À commencer par Madrid, qu'il gérait et où il n'obtient plus que vingt et un élus, soit juste l'avantage devant Manuela Carmena, juge à la retraite, soutenue par le parti Podemos 2. Les neuf élus du PSOE risquant de l'appuyer, on comprend l'appréhension dans les rangs de la droite. Signe qui ne trompe pas, on a constaté jeudi dernier (28 mai), devant l'hôtel de ville madrilène, la présence inhabituelle de cinq énormes containers bourrés de documents papier ayant été passés à la broyeuse. Ça sent vraiment la fin de règne.

À Barcelone, la claque est encore plus grande. Là, c'est Ada Colau (41 ans) qui arrive en tête avec sa liste composée de trentenaires, Barcelona en comú 3. Elle bat la droite, la gauche et les catalanistes, démontrant au passage que le plus urgent et important pour les Catalans n'est pas « l'indépendance », mais bien la question sociale et la lutte contre la corruption. Ce dernier point est parfaitement illustré par le cas Pujol, figure du nationalisme catalan et ancien président de la Catalogne qu'il a dirigée pendant vingt-trois ans (1980-2003). Ce vibrant « patriote » vantant les mérites de l'économie de sa région trouvait plus sûr et avantageux d'aller planquer son fric en Andorre (sept millions quand même !). Les taux d'intérêt y sont bien sûr plus juteux que dans sa Catalogne chérie. Indépendantiste oui, mais avec le portefeuille bien rempli !
Ce n'est certes pas le cas d'Ada Colau, qui présente la particularité de n'avoir jamais appartenu à une organisation politique. Elle s'est rendue célèbre en luttant sur le terrain au sein de PAH (Plataforma de afectados por las hipotecas) 4, pour s'opposer aux expulsions des familles surendettées ne pouvant plus payer leurs emprunts, et que les banques condamnent à la rue. Personnage atypique donc qu'Ada Colau, qui ne manque jamais de raconter qu'elle est née sous Franco, le 3 mars 1974, soit quelques heures après l'exécution par garrot vil de l'anarchiste Salvador Puig Antich : « Ma mère me le rappelle à chaque anniversaire et ça a marqué mon engagement pour lutter pour un changement social. » Mais le temps des promesses s'achève, il va maintenant falloir appliquer son programme plus social que politique : stopper les expulsions, transformer les appartements vides en logements sociaux, garantir les droits sociaux basiques (santé, restos caritatifs, baisse du prix de l'eau, du gaz et de l'électricité), instaurer un revenu minimum de 600 euros pour les familles précaires, s'opposer aux anciens projets contraires au bien commun... Sans oublier, comme promis, d'abaisser le montant de salaire de maire de Barcelone de 143 000 euros par an, à 2 200 par mois. À noter que le parti antilibéral Podemos (membre de cette coalition) a commencé à lâcher du lest pour faire face à la réalité dans le cadre d'une société qui demeure capitaliste : plus question de revenu de base universel, ni de retraite à 60 ans et exit le moratoire sur la dette. Les choses sérieuses vont commencer, en même temps que les tensions entre une base habituée à fonctionner horizontalement, et des dirigeants/responsables plus enclins à fonctionner de manière pyramidale. En ligne de mire, les législatives de novembre pour les uns, les luttes sociales pour d'autres, comme nos camarades anarcho-syndicalistes pour qui « il ne s'agit pas de voter pour changer de maître... mais de partir à la conquête d'une nouvelle société qui naîtra sur les ruines de ce système criminel qui prétend nous confisquer l'avenir et l'espoir ».


1. Parti Populaire et Parti socialiste ouvrier espagnol.
2. Nous pouvons : parti créé en janvier 2014.
3. Barcelone en commun.
4. Plateforme des victimes des hypothèques.

Ramon Pino

http://www.monde-libertaire.fr/internat ... isme-adios
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Re: Espagne

Messagede bipbip » 25 Juin 2015, 16:14

Madrid : le dernier compagnon emprisonné de l’Opération Piñata sort de prison

Le compagnon qui se trouvait dans la prison d’Estremera, Paull, a été remis en liberté aujourd’hui, avec charges et comme les autres en attente du procès.

Après différentes erreurs et négligences bureaucratiques de la part du tribunal et des fonctionnaires compétents pour cette affaire, s’achève ce dernier chapitre des opérations policières contre les anarchistes et anti-autoritaires dans l’Etat espagnol.

Nous ne baissons pas la garde, puisque dans cet enchevêtrement d’arrestations et d’incarcérations qui se produisent, Monica et Francisco restent incarcérés en préventive, sans procès et en attente d’une date.

De la même manière, les prisons continuent à être remplies de personnes et de vies enfermées entre quatre murs. Des compagnons anarchistes et rebelles emprisonnés pour lutter contre l’Etat, contre le pouvoir et ce qui est socialement accepté.
Des prisonniers séquestrés pour ne pas être capables ou refuser d’accepter le tissu de lois démocratiques destinées à te qualifier comme citoyen modèle. Des personnes qui voient leur futur se terminer derrière des barreaux pour essayer de se débrouiller.

Que continue la solidarité, l’action et la diffusion anarchistes.

LIBERTÉ POUR LES ANARCHISTES EMPRISONNES
A BAS LES MURS DES PRISONS

https://fr.squat.net/2015/06/25/madrid- ... de-prison/
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Re: Espagne

Messagede Blackwater » 29 Juin 2015, 18:47


Espagne : Apoyo Mutuo, ce mouvement qui veut renouer avec la démocratie directe

Déçu de voir les places se vider et par la voie électorale de Podemos, un nouveau mouvement social a vu le jour à la recherche du renouveau de la démocratie directe, horizontale et populaire.

Il y a quatre ans, le mouvement du 15 mai des Indignés, naissait sur la Puerta del Sol à Madrid. Le mouvement qui unifiait une large variété de courants politiques gagna ses lettres de noblesse grace à sa critique des mesures d’austérité menées par les partis au pouvoir (le PP et PSOE) et à son désir d’une réelle démocratie maintenant (¡Democracia real ya!) qui se concrétisa par des assemblées démocratiques et le rejet de toute forme de hiérarchie.


En mai 2014, Podemos émergea comme le nouveau parti politique qui tentait de conduire la démocratie populaire du 15-M dans les urnes, gagnant cinq sièges au Parlement Européen. Bien que Podemos se réclame l’hérité légitime du mouvement du 15-M, des voix s’élèvent à gauche pour affirmer que le nouveau parti à surtout précipité la démobilisation populaire en faisant croire que les inégalités sociales pourraient être résorbées dans les élections et par un parti « pas comme les autres ».

Avant les élections municipales du 24 mai, le parti que les résultats électoraux donnaient gagnant s’est pourtant distancié de ses promesses de mettre fin aux expulsions, de garantir un revenu minimum et de réduire l’âge de la retraite de 65 à 60 ans.

Alors que les médias se concentrent sur les résultats électoraux, une nouvelle initiative appelé Apoyo Mutuo (entraide mutuelle) a été dévoilé le 9 mai par des militant-e-s des mouvements sociaux, sceptiques quant à la voix électorale mais qui cherchent au contraire à un retour vers un mouvement social horizontal. Voici une interview de Dilia Puerta, militante féministe et porte-parole d’Apoyo Mutuo, qui décrit des motivations derrière ce projet et des aspirations à aller de l’avant.

Qu’est-ce que Apoyo Mutuo ? Peux-tu en dire plus sur ses origines et ses développements à l’heure actuelle ?

Apoyo Mutuo a pour origine la frustration ressentie par certaines personnes lorsque l’on voit qu’une large part de l’énergie qui fut mobilisée lors du mouvement du 15-M – tous les questionnements collectifs – est en train de dériver dans une voie électorale, vidant les rues et les places. Et tout cela se passe alors que beaucoup d’autres personnes issues des mouvements sociaux et qui ne s’identifient pas à ce changement ont l’impression de voir le train partir, les laissant derrière.

C’est à ce moment-là que l’idée d’écrire un manifeste s’est développée et c’est comme ça que le « construire un peuple fort, faire un autre monde possible » (Construyendo Pueblo Fuerte, para posibilitar otro mundo) [qui pose les bases d’Apoyo Mutuo] est arrivé. C’est un manifeste qui met en commun une déclaration d’intentions et qui rapidement a récolté 600 signatures. C’était l’élan fondateur derrière la création de l’organisation.

Nous sommes un large nombre de militant-e-s qui se sont rassemblés pour s’enrichir mutuellement.

C’est un réseau, une organisation ou une fédération ?

Pour le moment c’est un réseau de militant-e-s qui veulent s’organiser à un niveau commun partout dans le pays, et qui aspire à voir des groupes au niveau territorial rejoindre l’initiative dans le future.

L’annonce de la création d’Apoyo Mutuo a eu lieu quelques semaines avant les élections municipales. Podemos a clairement été un produit controversé du mouvement des Indignés. Comment vois-tu l’influence des Indignés et de Podemos dans l’émergence d’Apoyo Mutuo ? Essayez-vous dans une certaine mesure de réagir à la popularité de Podemos ?

Les Indignés fut une force de mobilisation extraordinaire : à la Puerta del Sol des gens avec des perspectives très différentes en terme de luttes sociales se sont rassemblés autour de l’idée qu’ils [les politiciens] ne nous représentent pas (“No nos representan”) qui était déjà un consensus accessible puisqu’il y avait un sentiment palpable d’indignation de la part d’un peuple fatigué de se sentir floué par la classe politique et qui sortait dans les rues pour manifester.

Dans ces manifestations, le besoin de nous organiser émergea rapidement. Ceux et celles qui avaient clairement des arrière-pensées électorales ont agi fortement et avec coordination alors que ceux et celles qui y étaient réticent sont restés paralysés, sans savoir comment articuler un discours commun et une organisation qui pouvait créer un espace pour ces sensibilités. Apoyo Mutuo est né de cette autocritique.

Ce n’est pas une réponse à la popularité de Podemos, c’est une option parallèle à l’heure où l’on peut constater que les quartiers et les places se sont vidés, parce que le sens de la représentation et de l’espoir que les gens ont ressenti avec cette nouvelle proposition électoral a eu pour résultat qu’il y a de moins en moins de mobilisations dans les rues. Cela génère de l’incertitude pour nous qui pensons que la politique ne peut se limiter à l’élection de représentant et d’un bulletin de vote tous les 4 ans. Nous ne pouvons pas déléguer notre responsabilité, en tant que peuple nous avons besoin d’être partie prenante dans les processus de prise de décision.

Lors de la présentation d’Apoyo Mutuo à Madrid le 9 mai dernier, l’un des orateurs a lu une citation des Zapatistes qui dit « nous ne disons pas de voter, mais nous ne disons pas non plus de ne pas voter ». En même temps votre manifeste dit 02_13_2008_28A-a03cd:

Nous respectons les camarades qui avant ce diagnostic commun ont choisi le chemin institutionnel de la participation au travers d’initiatives électorales, mais nous appelons à la mémoire collective pour mettre en évidence que les droits, les conquêtes et les grandes transformations sociales n’ont jamais été données par les institutions. Elles furent obtenues en se battant, gagnées dans la rue, dans les entreprises et dans les quartiers. Notre mémoire va suffisamment loin pour se rappeler que seul un peuple fort et combatif peut s’imposer face aux élites qui nous gouvernent ».

Peux-tu commenter brièvement votre perspective sur les élections ? Il me semble que vous n’organisez pas de campagne pour l’abstention active ? Est-ce que « l’autre campagne » des Zapatistes a influencé Apoyo Mutuo ?

Voter ou ne pas voter ne semble pas être la question importante ou transcendante. Ce que nous voulons est que le peuple se batte pour ses droits au-delà du jour des élections, créer de nouvelles formes d’auto-organisations, débattre, se rassembler de telle manière qu’en tant que voisins et en tant que peuple nous serions capable de proposer des réponses articulées et convaincantes. Ce n’est pas si important que tu votes ou que tu t’abstiennes tant que tu agis consciemment tous les autres jours de l’année.

Et évidement le mouvement Zapatiste est une référence. « L’autre campagne » a été une inspiration mais nous n’en sommes qu’au début.

Vos valeurs et le nom « Apoyo Mutuo » ont en commun avec l’anarchiste, mais vous n’utilisez pas ce terme. Vos visuels utilisent des couleurs comme l’orange, le bleu, le brun, le vert et le mauve plutôt que le rouge et le noir. Peux-tu nous parler un peu plus de votre décision de présenter votre initiative dans ce sens ? Quelle image voulez-vous présenter à la société ?

D’abord, il est important de clarifier que nous sommes une organisation avec des militant-e-s de différents mouvements sociaux (féministes, syndicalistes, écologistes, droit au logement, etc.) et que ce que nous avons en commun, parmi d’autres chose, c’est que nous ne voulons pas déléguer la politique aux voies institutionnelles. Certainement au sein de l’organisation, un bon nombre ont des idées libertaires, mais nous ne voulons pas être une organisions seulement « par et pour » les anarchistes ; nous voulons parler à tous-tes ceux et celles qui croient qu’un autre chemin est possible.

Il y a d’autres groupes, fédération, collectifs et syndicats avec des valeurs similaires. Pourquoi alors est-ce nécessaire de créer quelque chose de neuf ? Ou plutôt, qu’elle est la différence entre Apoyo Mutuo et les autres initiatives ?

Le but n’est pas de créer un nouveau collectif, mais plutôt de renforcer les réseaux qui existent déjà (pas une agglomération mais une coordination). Nous avons tous et toutes notre travail personnel dans nos collectifs. Nous ne voulons pas nous surcharger [avec un autre groupe], mais plutôt nous enrichir mutuellement en créant un espace de confluence.

C’est un espace pour articuler des alliances peu habituelle, tout en suivant la proposition de María Galindo dans son bouquin “¡A despatriarcar! Feminismo Urgente!” (Sortir du patriarcat ! Féminisme Urgent !). Nous avons besoin de sortir des ghettos identitaires qui asphyxient les idées. Parfois dans ces groupes certains oublient alors de « faire de l’idéologie ». En répétant toujours les mêmes slogans, on oublie de penser. C’est seulement en créant des alliances peu communes que l’on peut créer et actualiser un discours pour le 21ème siècle : un discours où le syndicalisme enrichit le féminisme, où le féminisme enrichit l’anarchisme, etc. Il est vital de créer un programme politique et une stratégie commune qui nous renforcent car il est plus que prouvé que l’unité crée de la force.

Pour conclure, qu’avez-vous prévus pour les prochains mois ? Quelles sont les étapes suivantes ?

Nous avons reçus un accueil très positif de personnes intéressées partout dans le pays par Apoyo Mutuo. Il y a une forte demande pour des présentations de cette nouvelle initiative partout en Espagne et en principe c’est ce que nous allons faire dans un avenir proche pour que les camarades soient informés et puissent participer.

A Madrid nous organisons aussi des assemblées ouvertes pour présenter nos proposition aux gens qui viennent et sont intéressés et pour répondre à leurs doutes. A la fin du mois de juin nous organisons un meeting national avec les membres d’Apoyo Mutuo des différentes régions pour créer un programme politique commun.

En tant que peuple nous avons besoin de continuer l’offensive et d’être un acteur politique réel, actuel et conscient. Nous avons déjà été sur la défensive pendant trop d’années, essayant de protéger les droits que nous avons gagnés en nous battant, les droits dont la classe politique nous prive continuellement en nous ignorant. Créer une conscience politique est un vrai objectif politique.


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Re: Espagne

Messagede Pïérô » 01 Juil 2015, 12:43

A Madrid, deux mille personnes manifestent contre une loi sur le droit de manifester

Deux mille personnes ont manifesté mardi à Madrid au son des tambours contre l’entrée en vigueur d’une loi très controversée qui encadre le droit de manifester.

... http://www.liberation.fr/monde/2015/06/ ... um=twitter
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Re: Espagne

Messagede bipbip » 08 Juil 2015, 09:07

En Espagne, austérité et privatisations détruisent le système de santé publique et nuisent à la qualité des soins

En Espagne, la politique d’austérité s’est traduite par des coupes budgétaires et des suppressions de postes massives dans les hôpitaux et les dispensaires publics. Aux dépens du personnel soignant, maltraité par une organisation du travail dégradé, et des patients, victimes de délais d’attente à rallonge et de négligences médicales en hausse. Le secteur privé profite, lui, d’une hausse des deniers publics, et de la privatisation rampante des hôpitaux. Les fortes mobilisations syndicales et citoyennes, ainsi que la victoire du nouveau parti de gauche Podemos à Madrid, ont pour l’instant mis un coup d’arrêt à cette destruction programmée du système de soins publics et universels. Enquête.

... http://www.bastamag.net/En-Espagne-aust ... e-publique
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Re: Espagne

Messagede Pïérô » 13 Juil 2015, 12:11

« Reprendre en main le récit des événements » - Entretien avec Jesús Rodríguez, du journal indépendant La Directa

Lancé il y a dix ans, La Directa est un hebdomadaire au fonctionnement horizontal, diffusé en Catalogne. Né sur papier, présent sur le web depuis 2011, et rédigé en catalan, ce « média d’information au service de la transformation sociale » a ses locaux dans l’effervescent quartier de Sants, à Barcelone. Rencontre avec Jesús Rodríguez, artisan historique de cet enthousiasmant journal, dont l’existence participe grandement de la vivacité politique locale (1).

... http://www.article11.info/?Reprendre-en ... -recit-des
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Re: Espagne

Messagede Lila » 25 Juil 2015, 21:28

Espagne – L’IVG interdite sans autorisation des parents pour les mineures

Changement réactionnaire dans le projet de loi espagnol modifiant l’accès à l’IVG ce jeudi : exiger une autorisation des parents ou des tuteurs pour les jeunes filles âgées de 16 à 18 ans.

Ce même jeudi, nos sénateurs français s’opposaient à la suppression du délai de réflexion de 7 jours pourtant voté en avril dernier par l’Assemblée Nationale. Réponse définitive à l’automne.

Un jour avant, mercredi 21 juillet, le Parlement portugais lançait l’attaque par un projet de loi restreignant l’accès à l’avortement dans le sens où il deviendrait payant et soumis à un suivi psychosocial moralisateur.

Insupportable retour en arrière en Europe, restreignant le droit aux femmes de disposer de leurs corps en limitant l’accès d’une manière ou d’une autre à l’avortement. A croire qu’il n’y a que ça à faire cet été : perdre du temps à revenir en arrière sur des droits FONDAMENTAUX !

https://sanscompromisfeministeprogressi ... -mineures/
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