14 juillet: les rouges gagnent du terrain
Une source anonyme a fait parvenir dans la nuit ce projet de discours à ASI, en le présentant comme l'allocution que doit prononcer ce soir Emmanuel Macron. Ce document capital me semble devoir être rendu public.
Françaises, Français, mes chers compatriotes,
Depuis le début du mouvement des Gilets jaunes, le gouvernement et moi-même avons toujours été en retard dans les réponses que nous y avons apporté. Derrière de bonnes paroles de compréhension et des mea culpa vides, nous avons d'abord parié sur son pourrissement, n'y voyant qu'un agglomérat d'illettrés, de Gaulois réfractaires, et de gens qui ne sont rien. Jour après jour, nous avons scruté les sondages. En vain. Nous avons ensuite supprimé les hausses de taxes sur l'essence, mais dans une telle confusion que tout le bénéfice politique de ce recul a été annihilé. Samedi dernier encore, nous avons cru qu'une répression de masse pourrait intimider la colère populaire. Nous nous sommes encore lourdement trompés.
Tout atermoiement, ce soir, ne pourrait être perçu que comme une entourloupe. Je pense par exemple à tous les projets de "grand débat", "d'états généraux", de "Grenelle de la fiscalité", que ne cessent de proposer les cerveaux fertiles qui m'entourent, et qui occupent les bavards des chaines de télé. Vous n'y verriez qu'un moyen de gagner du temps, et vous auriez raison.
Vous attendez de moi un geste politique clair, le voici. Conscient que ni la majorité, ni le gouvernement, ni a fortiori moi-même ne bénéficions plus de l'autorité suffisante pour poursuivre les réformes nécessaires à notre pays, je prends une décision simple, lisible, capitale, et qui ne coûte rien, ou pas grand chose : je dissous aujourd'hui l'Assemblée Nationale.
J'invite les gilets jaunes, comme tous les mouvements politiques traditionnels, à revivifier notre démocratie, en présentant des candidats, dans chaque circonscription. Pour les y aider, les candidats investis par ce mouvement, à condition qu'il ne s'en présente qu'un seul par circonscription, bénéficieront d'une avance conséquente sur les dépenses de campagne. En cas de non obtention du seuil de suffrages nécessaires, cette avance ne sera pas remboursable. C'est un bien minime investissement dans la création d'une démocratie nouvelle.
C'est à cette Assemblée nouvellement élue, et au gouvernement qu'elle soutiendra, qu'il appartiendra, dès leur entrée en fonction, de prendre les mesures propres à concilier urgence sociale et urgence climatique. Si l'Assemblée Nationale nouvellement élue décide de proposer des réformes institutionnelles, comme l'instauration de la proportionnelle, le référendum d'initiative citoyenne, ou même de se proclamer Constituante, je m'engage non seulement à ne pas y faire obstacle, mais à l'appuyer de toutes mes forces. Je serai fier de rester dans l'Histoire comme le président qui aura permis cette révolution légale et pacifique.
Dans l'immédiat, le gouvernement expédiera les affaires courantes, à l'exception d'une seule mesure : une réévaluation du SMIC de 20%, au 1er janvier.
J'ai bien conscience des innombrables difficultés qui ne manqueront pas de surgir tout au long de ce processus. J'ai notamment conscience que ma confortable majorité LREM sera balayée. C'est un bien mince inconvénient. Et il n'y a pas d'autre voie.
Marseillaise. Zoom arrière sur l'Elysée.
Je dois avouer ma surprise : ces accents sont à la hauteur de la circonstance. On y reconnait le panache, la franchise et la lucidité dont était crédité notre jeune président avant son élection. Pour être honnête, si j'avais dû écrire sa périlleuse allocution de ce soir, je ne l'aurais pas écrite autrement. Mais cette ferme résolution résistera-t-elle à une longue journée ? Réponse à 20 Heures.
Emmanuel Macron, président de la République Française vous écrit :
"Bande de fainéants,
Faites un effort, merde, rentrez chez vous !
Pour l'essentiel je garde le cap. C'est pas vos promenades du samedi qui me feront changer de politique.
Je vais même vous balader encore un peu avec mon grand débat, histoire de noyer vos revendications à deux centimes d'euros.
Pour tous ceux qui se promènent avec un gilet jaune, Castaner a l'ordre de donner l'ordre aux préfets de donner l'ordre aux flics de tirer dans le tas, de viser les yeux avec les flash-ball, de noyer les places de gaz puissants, de matraquer sans vergogne, jeunes, vieux, hommes et femmes, de faire des arrestations arbitraires pour foutre les jetons à cette bande d'illettrés. Les procureurs ont aussi leurs consignes pour faire juger dans les tribunaux expéditifs à de lourdes peines incohérentes tous ceux qui remuent le petit doigt.
Tiens, je ne sais même pas pourquoi je fais l'effort d'écrire cette lettre, vous ne pourrez probablement pas la lire.
Et si vous la lisez, vous ne comprendrez probablement rien, si on n'en juge par le nombre de manifestants toujours plus déterminés à chaque acte. C'est à croire qu'on m'a foutu à la tête d'un pays d'ivrognes, des moins que rien.
Pour la politique à venir, c'est pas un scoop, on continue, plus vite, plus fort, plus radical, plus violent, plus méprisant, plus riche, plus vendus, plus dégueulasses qu'avant, plus voleurs, plus pollueurs, plus injustes... et moins social.
Bon, je vous la fait courte, circulez y' a rien à voir, et comme on dit "j'ai déjà donné !". La porte est fermée, vous n'êtes pas les bienvenus, ni dans la rue, ni dans les universités, ni dans les usines, ni dans les bureaux, ni dans les hôpitaux, ni dans les Ehpad, encore moins dans les écoles, à l'assemblée n'en parlons pas, j'veux plus vous voir, disparaissez ! Putain, faut vous le dire en quelle langue ?!
Votre président de la république qui commence à en avoir marre de vos conneries.
Emmanuel Macron.
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