Acte 1 : La CGT révèle le scandale des offres d’emploi illégales
Pôle emploi s’est lancé le 19 juillet 2017 dans un "plan communication" concernant les offres d’emploi illégales. Faute de résoudre le problème, sa stratégie est de faire croire que le problème est négligeable. Petit retour dans le temps : La CGT alerte depuis longtemps la direction de Pôle emploi à ce sujet. Le 1er septembre 2015, lors du comité central d’établissement, les élus CGT ont demandé à Jean Bassères, directeur général de Pôle emploi, de remettre en place le contrôle des offres par un agent Pôle emploi AVANT leur diffusion. En effet, le scandale de l’explosion du nombre d’offres d’emploi illégales sur le site institutionnel pole-emploi.fr vient de l’ouverture du site aux sociétés privées de diffusion d’offres, qui, elles, ne contrôlent pas leurs offres avant de les diffuser. Seul un algorithme informatique filtre les offres. Les agents Pôle emploi sont mis sur la touche. Problème : Un algorithme, c’est très con, et ça n’est pas en mesure de connaître la différence entre une offre légale (conforme au contrat réellement proposé par l’employeur) et une offre illégale (offre inexistante, mensongère, discriminatoire, ou carrément frauduleuse). Seul un agent aguerri, qui connaît son bassin d’emploi, peut détecter un mensonge, voire une arnaque. A l’époque, pendant cette réunion du comité central d’établissement, le directeur général s’était permis en séance d’accuser la CGT d’être "archaïque". Le plus important pour ce grand visionnaire est de FAIRE DU CHIFFRE, c’est-à-dire de diffuser le plus d’offres possibles, peu importe la qualité ! En 2016, l’union départementale CGT du Morbihan alerte à nouveau la direction de Pôle emploi suite à trois études (en janvier, juillet, et septembre) portant chacune sur 400 offres environ. Le résultat est affligeant : entre 25 et 30% des offres sont tout simplement... Illégales ! Le 17 février 2017, la confédération réalise une étude portant cette fois-ci sur 1300 offres concernant 4 villes et presque tous les métiers, et publie l’intégralité des éléments de l’étude. On touche le fond. 50% des offres étudiées ne sont pas conformes.
La confédération CGT rend public le scandale : Pôle emploi met le paquet pour fliquer les chômeurs, mais, les offres, elles, ne sont plus contrôlées. La CGT contacte aussi les responsables politiques, députés et sénateurs, qui relaient sa demande de reprendre le contrôle des offres avant diffusion, à la ministre du travail. Le site "le lanceur", quand à lui, dénonce aussi les dérives d’un système devenu incontrôlable : Pôle emploi diffuse des offres de prostitution déguisées. La presse grand public commence alors à s’intéresser sérieusement au sujet. Les Echos écrivent un article sur le sujet, suivis de Ouest France. France inter réalise un reportage sur les offres pourries de Pôle emploi. Plus tard, RTL aussi traitera le sujet (après une première approche en 2016)
Acte 2 : Pôle emploi ne s’estime pas responsable des offres diffusées sur son site
La stratégie de communication de départ de Pôle emploi "circulez y’a rien à voir" ne tient plus. Contactés régulièrement par les politiques et la presse, la direction de cet établissement public est contrainte d’apporter d’autres réponses : Elle publie ainsi le 19 juillet 2017 le résumé d’une étude portant sur 4700 offres, en indiquant : "seulement 10% des offres ne sont pas légales". Pour arriver à ce chiffre, Pôle emploi a délibérément choisi de ne pas vérifier si les contrats proposés par les employeurs étaient bien conforme à l’offre diffusée (alors que c’est une obligation légale). Et ils annoncent la mise en place d’un nouvel algorithme, forcément beaucoup plus intelligent que tous les autres utilisés avant, en septembre. On les priés de les croire sur parole, alors que tous les autres algorithmes sont des vraies passoires.
Selon la direction de Pôle emploi, le meilleur moyen d’éviter de tomber sur une offre d’emploi illégale sur le site pole-emploi.fr serait... D’être vigilant ! Le tribunal administratif de Caen, qui juge une affaire dans laquelle Pôle emploi est accusé d’avoir diffusé une offre "arnaque", estime que Pôle emploi n’est ni responsable ni coupable. Salauds de pauvres, fallait faire gaffe, bon sang ! FO, de son côté, vient en soutient à la direction de Pôle emploi, en considérant qu’elle fait le maximum pour assurer la légalité des offres : "Le processus mis en place par Pôle emploi est assez efficace ; il est difficile de faire mieux", salue Michel Beaugas, administrateur FO. Source : AEF info. Michel Beaugas ne doit pas être au courant que chaque offre, en 2014, était contrôlée par un agent Pôle emploi formé à cette tâche...
Acte 3 : Pôle emploi enfonce le clou et assume son rôle de fossoyeur du service public de l’emploi
Alors que l’ANPE devait fêter cette année ses 50 ans, Pôle emploi, lui, fête... La mort du service public. En refusant de faire contrôler les offres avant diffusion par un agent public formé à cette tâche, et en se dédouanant de la responsabilité de la fiabilité des offres disponibles sur son site, tout en appelant à la responsabilité des diffuseurs et des chômeurs, Pôle emploi refuse tout simplement d’assumer son rôle d’établissement public ayant une mission de service public. Pendant 47 ans (de 1967 à 2014), l’ANPE, puis le Pôle emploi, ont fait contrôler par un agent public formé à cette tâche, avant diffusion, CHAQUE OFFRE D’EMPLOI qu’ils diffusaient, que ce soit sur listing papier ou sur internet. Les agents connaissaient les employeurs aussi bien que les chômeurs. Mais ça c’était avant. Pour le Pôle emploi d’aujourd’hui, c’est ringard. Obsolète. "Archaïque" comme l’aime à le dire Jean Bassères, le boxeur poids lourd du service public. Les chômeurs n’ont qu’à se démerder. Fini le service public de qualité. Le numérique, y’a que ça de vrai. Et le chiffre, car l’objectif, une fois encore, c’est bien de diffuser LE PLUS D’OFFRES POSSIBLES, même si elles sont totalement bidons, et même si les offres d’emploi ne sont que le troisième moyen de retrouver un emploi en France, après les démarches personnelles auprès des employeurs et les relations personnelles et professionnelles...
On attend toujours la position officielle de Mme Penicaud, la ministre du travail. En attendant, les agents Pôle emploi ont toujours le feu vert pour radier les chômeurs qui refuseraient des offres "raisonnables"... Même illégales !